19 octobre 2010

Le reportage de nos envoyés spéciaux au FIG de Saint-Dié






Voici des extraits des compte-rendus rédigés par les élèves de Terminale ES 1 de Claude Gellée d'Epinal :

Première conférence : "Moscou et les provinces russes, des mondes à part ?" par Jean Radvanyi, directeur du centre de recherches franco-russes à Moscou, géographe.

"Aujourd'hui la Russie est un pays ouvert : totale liberté de circulation des habitants. Il leur est cependant plus difficile d'aller dans des pays frontaliers (Ukraine) qu'en Egypte ou en Europe occidentale. Les Russes fonctionnent dans plusieurs mondes : d'abord une vie en Russie très inégalitaire, puis une vie dans un autre pays où ils gagnent plus mais retournent toujours au pays. Cette double vie donne aux Russes la possibilité de quitter la Russie ou de la changer (critique par rapport au monde par les voyages). La Russie c'est aussi la propriété privée. De nombreux secteurs autrefois nationalisés sous l'URSS sont maintenant privatisés (commerce, industrie,...). ce changement de système très rapide a apporté le chaos. Poutine essaie de reprendre la situation en main. La Russie est capitalsita mais conserve des lois différentes de chez nous. Les grands secteurs sont sous la surveillance de l'Etat. Les petites entreprisespeinent face à la concurrence et à la corruption des administrations. C'est plus facile pour les grandes entreprises qui envisagent de parti à l'étranger mais cela pose problème au gouvernement (procès Khodorkovski). Les informations sont contrôlées, surveillées, mais internet est libre. La télévision est entièrement contrôlée. Le gouvernement fait pression sur les opposants par crainte. La Russie est donc un régime de transition. Ce n'est plus le régime soviétique mais ce n'est pas non plus une démocratie. Moscou est la capitale tentaculaire de la Russie, c'est une vitrine. Un tiers des services de l'économie s'y est installé. Elle compte 7% de la population et elle capte 20% des revenus. Elle accapare à elle seule 65% du PIB. Alors que les 20 % régions les plus pauvres n'ont que 3% du PIB. Ce sont les régions d'Extrême-Orient (Nord au Sud) avec un exode supérieur à 50% et les vieilles régions européennes mais aussi les Républiques du Sud (Caucase, Tchétchénie). En 2009, il y a une légère augmentation de la population après 9 an de baisse mais avec les incendies de 2010, la population va baisser. Il y a don un objectif : moderniser la Russie."
Compte-rendu écrit par Emilie, avec quelques éléments tirés de celui de Marie.

"La Russie ne ressemble pas à l'image qu'on donne d'elle. Elle n'a jamais été aussi ouverte. Liberté de circulation quasi-totale, plus besoin de visa de sortie."
Jodie





Deuxième conférence : "New York et Moscou, deux mégapoles" par Renaud Le Goix, Géographe (Université Paris I)

"NY pèse à elle seule autant que les autres places boursières. L'agglomération s'étend sur plusieurs Etats (NY, New Jersey, Connecticut). Elle se décompose en boroughs (quartiers) : Manhattan (plutôt riche), le Queens (Beaucoup d'Asiatiques), le Bronx (une majorité noire, très populaire), Staten Island et Brooklyn. Il y a une nouvelle élite à NY. Elle est attirée vers des quartiers comme Harlem (Nord de Manhattan) qui est une zone attractive depuis vingt ans, surtout la 125ème rue qui est au coeur du quartier. L'Etat fédéral a injecté des millions de dollars pour rénover le quartier. Il y a donc une gentrification (=embourgoisement) avec l'accueil de riches à Harlem où ils cohabitent avec les plus pauvres. Harlem bénéficie d'un effet de mode qui attire une population blanche et aisée alors qua vant elle était plutôt noire et populaire. Les plus pauvres sont de plus en plus exclus. Les loyers ont augmenté. Le mouvement s'est accompagné d'une exclusion sociale et d'un "nettoyage" de la ville, notamment des criminels avec le concept appliqué au monde entier "the broken window" [dès qu'une fenêtre est brisée, elle est tout de suite remplacée]. Pour cela, le contrôle social a été renforcé. Par exemple, les SDF qui dormaient dans les parcs ont été chassés pour faire revenir les riches. Des caméras, des gardes, le wifi ont été mis en place pour "le capuccino", soit ceux qui viennent boire un café dans le parc avec leur ordinateur, comme à Central Park. Ce mouvement a été financé grâce à la sphère privée donc des marchés financiers. Aussi les prisonniers sont envoyés des prisons privées au Nord de l'Etat, près de la frontière canadienne. A New York, 25% de la population masculine noire a fait de la prison."
Emilie

"Lorsqu'on parle de New York, c'est au niveau international. Il faut cependant s'intéresser aussi à NY intra-urbaine et de manière prospective. On peut constater un écart important entre riches et pauvres : environ 20% des plus pauvres gagnent 50 plus que les 20% les plus pauvres."
Benjamin



"NY connaît un problème d'étalement, de vieillisement des transports de la ville. Division sociale de l'espace : les beaux quartiers et les autres= ségrégation sociale. NY si riche si pauvre : un nombre important de la population vit sous le seuil de pauvreté, notamment dans les ghettos. Le quartier de Harlem, un quartier multiethnique, est l'un des plus pauvres de la ville."
Aline

"La classe moyenne est périurbaine, mais les riches eux vivent dans le Sud de Manhattan, le NY pauvre est retranché au Sud-Est autour de Chinatown et à Harlem [Nord de Manhattan]."
Rémi



16 août 2010

Sur les traces d'un conteneur... (2)

Les étapes précédentes (novembre 2009-avril 2010)

Départ de Nhava Sheva (Inde) le 15 mai 2010

Gênes (Italie) : arrivée le 29 mai 2010, départ le 31 mai

Montreal (Canada) arrivée le 11 juin 2010, départ le 28 juin

Valence (Espagne) arrivée le 7 juillet 2010, départ le 30 juillet

Khor Fakkan (Emirats Arabes Unis) arrivée prévue le 18 août 2010, départ prévu le 20 août

Doha (Qatar) arrivée prévue le 23 août 2010



Notre conteneur a quitté Dubaï (Port de Djebel Ali) aux Émirats Arabes Unis le 25 septembre 2010 à bord du Williamsburg Bridge. Il s'agit d'un porte-conteneurs de 51759 t construit en 1998 et immatriculé à Singapour (sa photo ci-dessus; source). Il tient son nom d'un pont de New York au-dessus de l'East River reliant Brooklyn à Manhattan (voir sur la carte). Il est armé par la compagnie japonaise K-Line (Kawasaki-Kisen-Kaisha Ltd, 15ème armateur mondial) Voyez ci-dessous une vidéo très apaisante de ce navire...



La destination de notre conteneur Hanjin est Busan en Corée du Sud (arrivée prévue le 17 octobre) puis le port de Seattle, Tacoma dans l'Etat de Washington aux Etats-Unis.
Notre dossier sur Conteneurisation et mondialisation


Le trajet sur une Google map :


Afficher Sur les traces des conteneurs/Container Tracking sur une carte plus grande

01 juillet 2010

Perles 2010 : Elles sont là !

[Carte d'une Europe où il n'y aurait plus de problèmes de voisinage... établie par l'hebdomadaire britannique The Economist, trouvée sur le site Strangemaps.]


Précisons comme d'habitude pour commencer que l'erreur est humaine et que l'objectif de la mise en ligne de ces perles est finalement d'apprendre à ne pas faire les mêmes... Je ne gagne pas non plus d'argent avec ce blog ! J'ai conservé l'orthographe d'origine, les seules indications que j'ai ajouté sont entre crochets. Il y a aussi de très bonnes copies...


Composition 1 : Le Tiers-Monde : Indépendances et tentatives d'organisation (1945-fin des années 1980

  • La décolonisation accélérée a été heurtée par la Seconde Guerre mondiale
  • Nous allons voir tous d'abord l'indépendance en lui même avec ces différentes forme pour ensuite étudier les tentatives d'organisation qui ont été colonisées.
  • Après la capitulation allemande lors de la Conférence de Yalta
  • Le premier pays a vouloir donner son indépendance sont les Indes britanniques
  • Il s'ensuit de la volonté de l'Algérie mais la France ne veut en aucun cas laisser l'Algérie se demera. Des attentats se firent entendre en Algérie et dans sa métropole, attentats perpétrés par l'OAS (organisation de l'Armée secrète) afin de promouvoir la volonté d'indépendance de l'Algérie.
  • Notons que des Algériens se battent ave les Français pour que l'Algérie reste française = par exemple l'organisation de l'armée secrète
  • L'énonciation du mot Tiers Monde fut annoncée par un géographe et économiste Français Alfred Sauvy pour parler des nouveaux pays apparuts grâce au processus de décolonisation car ils représentent plus du Tiers de la population mondiale.
  • Le Tiers-Monde est une notion apparue à la fin des années 50, son inventeur est le sociologue Alfred Sauvy il donna ce nom en référence au tiers-Etat dans l'Antiquité.
  • Malgré ce choix, la plupart des pays ont du mal a décollé économiquement, c'est pourquoi au vu de la politique d'"empeachment" ou de l'endiguement instaurée par les Etats-Unis
  • En 1965, l'Etat d'Israêl est proclamé indépendant.
  • Tito (Brésil), Nasser (Egypte), Ho Chi Ming (Chine)
  • En 1949 il y a eu la guerre puis l'indépendance de l'Indochine, on reconnait aussi l'Empire de Chine.
  • En 66 après une guerre : c'est la Corée qui obtient son indépendance.
  • En 56: les accords de Genève provoquent l'indépendance de la Tunisie et du Maroc.
  • Les métropoles britanniques adopte une stratégie d'indépendance pacifiste pour ses colonies


Composition 2 : Les démocraties populaires et leurs évolutions (1949-1989)

  • Les Etats Unis, jouent la stratégie, et crées des pactes (en 1955 : Pacte de Varsovie, en 1947 : Plan Marchal)
  • Pour commencer nous allons developper les deux démocraties populaires qui règnent sur le monde
  • Les Etats Unis sont mené par Kenedy, le président jusque son assacina le 22 novembre 1963, c'est lutterking qui est élu par la suite
  • les chocs pétrolier (1er=1973-1990, 2ème 1980-1993)
  • C'est le cas de 1950 à 1954 lors de la guerre de Corée. Chacun occupant une partie de la Corée, les Etats Unis au Nord et l'URSS au Sud.
  • L'indépendance de l'Afrique en 1989
  • De plus le plan Marchal de 1947 est un pacte qui nous lie (la France), au Etats-Unis, à jamais.
  • La guerre froide. Il s'agit d'une guerre que l'on pourrait qualifier de géo-politique car elle se réalise sans armement
  • En 1953 la mort de Staline et l'arrivée de Khrouchtchev au pouvoir va changer la physionomie de cette guerre. En effet le pack soviétique explose et déclenche l'indépendance de nombreuses républiques soviétiques. Un accord sera néanmoins créé entre la Russie et les pays de l'ex-URSS dans lequel chaque pays s'engage à ne pas attaquer les autres, c'est le pacte de Varsovie.
  • Le 9 octobre 2009, les télévisions françaises, allemandes et même italiennes, retraceraient l'histoire du Mur de Berlin, en hommage à sa chute le 9 octobre 1989.
  • La mise en place en 1949, de la CECA, ne fait que renforcer les liens économiques entre Moscou et ses démocraties
  • Khrouchtchev accorde l'indépendance aux partis indépendantistes.
  • Ce mur sépare matériellement la RFA de la République Fédérale allemande.
  • On compte en Birmanie plus de 500 000 déportés à cause de la répression soviétique.
  • En 1989, Brejnev qui est alors apparu comme le chef de la chef face aux militaires décident de briser définitivement ce qu'il reste du parti.
  • Pour ressérer l'alliance avec la Pologne, il y a la création du Pacte de Varsovie en 1955.

[Fautes de frappes ?]
  • brèvement
  • envaillir
  • fénomène
  • containtment
  • cohalition
  • cohexistence
  • géroncratie
  • une grise gouvernementale éclate



Etude d'un ensemble documentaire : Comment ont-évolué les mémoires de la Seconde Guerre mondiale en France depuis 1945 ?

  • On peut dire que malgrés les années qui passent, ce désastre reste toujours dans un coin de la tête.
  • Donc visuellement, les français doivent faire face à la réalité
  • Mais malgrés cela, la France est un pays qui ne peut pas vivre sans son passé.
  • la mémoire de la seconde guerre mondiale a été pudique.
  • A la fin de la guerre, les horreurs sont d'abord tentées d'être oubliées par la population européenne.
  • Cette période terrible que fut l'occupation de notre Patrie la France.
  • l'effort certain des communistes français. En effet, il faut reconnaître qu'ils ont été les principaux actionnaires de la Résistance.
  • La Résistance face à l'occupation, bien qu'elle fut peu nombreuse comparée à toute la population, elle fut efficace, mais à couté en litres de sang.
  • L'Etat français a collaborer avec l'Allemagne et a exportés des milliers de Juifs.
  • exporté dans des camps de travail ou d'extermination
  • Les mémoires des exportations des Juifs
  • Ces héros [de la Résistance] sont la fierté de la Nation et on voit apparaître le protestantisme, car tous les Français se sont battus pour son pays.
  • Même si on a rasé la tête des femmes qui auraient fréquenté des allemands pendant l'occupation, le gouvernement lui-même a collaboré. Et elle a participé à des génocides, rafles, comme le Vel d'hiv.
  • Autre fait marquant mais aussi scandalisant
  • Le président de la République de l'époque, Monsieur Jacques Chirac avoue.
  • La Seconde Guerre mondiale reste et restera dans l'Histoire de l'Humanité une période qui sur le plan des pertes humaines est beaucoup plus importante que la première, ce qui fut un problème redressable car suivie par un fort taux de natalité, appelé le Baby Boom.
  • Effectivement, la population française a beaucoup souffert, d'une part par le totalitarisme des ennemies qui leur ont soulevé toute leur consommation.
  • Simone Veil reste l'icône de la victoire française.
  • Le Parti communiste sera le grand parti de la Renaissance française. Et sans oublier le grand Général de Gaulle organisateur de celle-ci.
  • Un bilan indescriptible, dénonciable
  • Tout est à reconstruire que ce soit physiquement, virtuellement (monuments...) mais aussi moralement, mentalement.
  • De Gaulle est à l'origine des Trente glorieuses et semble être à son apogée en 1968
  • La devise de la France, solidarité, égalité, fraternité, est alors remplacée par travail, famille, patrie.
  • En organisant la débarquation anglo-franco-américaine
  • Jean Moulin (communiste)
  • Le document 1, 2 et 5 est une sorte "d'échelle sentimentale"
  • Nous sommes à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, De Gaulle basé à Londres Appelle toute personne-voulant résisté à l'Allemagne. De Gaulle parvient a creer un groupe (Résistant) formé de toutes les nationalités (Anglais, Etats-Unis, communiste,...)
  • La Résistance et la Victoire des résistants a été une bonne chose et donc ça va d'une logique qu'il y est des memoires.
  • L'occupation nazies avec les privatisations pour tous
  • Cette affiche [communiste] qualifie aussi le général de Gaule d'"écrivain de la résistance
  • Le 9 novembre 2009, la Fance entière a fêté le 20ème anniversaire de la chute du mur de Berlin, parce qu'on se souvient qu'il est tombé dans la nuit du 9 au 10 novembre 1989
  • le Maréchal Pétain, digne héros de la Première Guerre mondiale, a décidé de collaborer avec Hitler pour le bien de tous.
  • La Seconde Guerre mondiale a explosé le nombre de morts
  • Le Régime de Vichy est "nul et sans avenue" [ça n'est pas tout à fait faux... c'est une de mes préférées !]
  • Dans le discours de M. Jacques Chirac, on ressend un sentiment de désolement
  • Tout d'abord, il faut renrdre hommage aux alliées et à la France elle-même. Grâce à nos alliées, les Allemands ont été repoussés de Paris. Puis encore grâce à eux, l'Allemagne va capitulé. Une grande reconnaissance leur a été transmise. D'ailleurs, les Français pour l'Amérique, pour montrer leur gratitude, construit la statut de la liberté qui montre du doigt la direction de la France. Mais la France doit avoir aussi une fière chandele au Parti communiste. [Là je ne vous note pas tout, toute la copie est comme ça] On en parle pas assez, mais la France doit avant tout sa victoire à l'armée. La Patrie ne les remercierons jamais assez. Puis nos mémoires aussi sont données aux Juifs. [...] On remercie la Patrie, le Parti communiste, les alliée, l'Etats et ses dirigeants d'avoir aidé la France pendant l'occupation allemande.
  • Dans le document 1 et 4, les mémoires de la résistance apparaissent comme des images fortes, robustes, déterminées.

[Fautes de frappes ?]
  • On vente la résistance et la victoire des français ainsi que l'odasse
  • Cette période reste en travers de la george.
  • Depuis la capitalisation allemande le 8 mai 1945
  • affiche de propange
  • oréol
  • simpatie
  • négacionnisme



Croquis 1 : L'organisation spatiale de l'Europe rhénane

  • Francfort capitale financière de l'Europe (FBC)
  • La partie de l'Europe rhénane la productive économiquement, la plus affûtée
  • espace en voie de développement [Tout ce qui n'est pas l'espace rhénan dont le reste de l'Allemagne et de la France]
  • Une population moyennement peuplé
  • Espace Schengen [couvrant uniquement l'Europe rhénane]
  • Lyon [à la place de Bâle], Bâle [à la place de Stuttgart], Zurich [à la place de Francfort], Luxembourg [à la place de Lille], Berlin [à la place de Hambourg]
[Fautes de frappes ?]
monaitère
inégsestante


Croquis 2 : La Russie : un territoire inégalement peuplé et mis en valeur

  • Problème tchécoslovaque [dans le Caucase]
  • Mer Baltique [à la place de Norvège et Suède]
  • Mer Egée [à la place de la Mer Caspienne]
  • Nombreux ports situés le long de la frontière avec le Kazakhstan, la Mongolie et la Chine
  • Le coeur de la Mégalopole [pour la Russie d'Europe]
  • Métropole très attractive avec la banque financière de moscou mondiale
  • axe principal maritime [pour le Transsibérien]
  • Océan Pacifique [ à la place du Kazakhstan, de la Mongolie et de la Chine]
  • Vu également dans une copie corrigée par un collègue les grandes métroples russes bien connues : Croatie, République Tchèque, Hongrie, Pologne
[Fautes de frappes ?]
pérriférie
Volvograd



ça vous a plu ? Retrouvez les perles des années précédentes : 2005, 2006, 2007, 2008 et 2009.

05 avril 2010

68 raconté à mes petits-enfants (4) Pendant ce temps... UEC et UJC



Suite du témoignage de Guy Charoy, après sa découverte de la politique et ses premiers engagements, Guy s'est lancé dans la "vie active" comme instituteur. Il nous a raconté ensuite sa mutation à Badonviller où il s'ennuie ferme mais en profite pour lire et continue à "barbouiller".
Cette semaine, il nous éclaire sur la mouvance d'extrême-gauche qui ne se reconnaît pas dans le Parti Communiste. Une partie des communistes adoptent une attitude pro-chinoise et se tourne vers le maoïsme en critiquant le "révisionnisme" des communistes fidèles à Moscou. Cette tension aboutit à leur exclusion de l'UEC en 1966 et à la fondation de plusieurs groupes marxistes-léninistes hors du PCF.


Après ce long préambule qui permet de me situer par rapport à ceux que je vais côtoyer pendant toutes les années agitées d’activité politique et dont un certain nombre sont encore mes amis, je dois donner quelques indications sur la situation historique. Et je prendrai l’essentiel des informations dans Wikipédia.

"L'UEC (Union des Étudiants communistes), si elle a été fondée en 1939, est issue d'un grand nombre de groupes étudiants, aux effectifs et à la durée de vie plus ou moins importants, dont les plus anciens remontent à la toute fin du XIXè siècle. Cependant, on peut dater l'émergence du mouvement étudiant communiste à 1920, en parallèle avec la création de la jeunesse communiste et du Parti communiste français.
Comme pour ces deux organisations, c'est la question de l'adhésion à la IIIe Internationale qui aboutit à sa création. Les tendances et membres désignées comme « gauchistes » par l'UEC sont exclues en 1966, elles seront particulièrement actives dans la révolte étudiante de mai 68. Les exclusions ont pour raison principale soit l'adhésion de membres (comme Alain Krivine) aux idées trotskistes critiquant et rejetant durement le stalinisme et ses dérivés, qui aboutit à la formation de la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR, trotskistes). Soit la rupture de membres avec l'URSS préférant soutenir le maoïsme et la Chine, créant ainsi l'Union des jeunesses communistes marxistes-léninistes (UJC (ml), maoïstes).

1966
"La constitution, à la fin de 1966, des premiers Comités Vietnam de Base, c'est donc la réponse correcte dans son principe et dans sa forme, à la nécessité objective de l'édification en France d'une force politique anti-impérialiste capable de concrétiser la solidarité de fait entre le peuple français et les peuples agressés par l'impérialisme, capable de concrétiser les aspirations profondes du peuple français à soutenir la lutte des peuples qui affrontent directement l'impérialisme.

VIVE LE PEUPLE VIETNAMIEN
VIVE LE PEUPLE LAO
VIVE LA SOLIDARITE DES PEUPLES CONTRE L'IMPERIALISME
VIVE LA VICTORIEUSE GUERRE DU PEUPLE"

Introduction et conclusion du Congrès des Comités Vietnam de Base en mars 68

[Portrait du leader vietnamien Ho Chi Minh par Guy Charoy]

Complément d’information donné par mon vieux camarade Georges [1] : Ce n'est qu'en 1965, qu'il y a eu les années pro-chinoises (jusque-là le grand homme, et il le reste pour moi, c'était Sartre). [Il y avait ] Nofal [2] et moi, l'Hauwuy étant plutôt côté PCMLF, Murielle Hocquaux [2]– chez qui, dans les Vosges on s'est réuni à une dizaine avant de faire notre GRCP [3]... Union ensuite à l'UEC que nous avons vidée en créant l'UJC-ML dont nous fûmes la première cellule à sortir au grand jour, année fertile avec la venue de Judith Lacan [4] ("Docteur, j'aime votre fille, que dois-je faire?", Nofal), Françoise Gacon dont s'empara le Minibob [deux étudiants en philosophie], et Régis Debray qui nous avait présenté aux Ulmiens (Robert Linhard [5], Benny Lévy, plus tard Victor, Christian Riss, etc.).


Un soir [donc en 1966], je dois me rendre à la Librairie du Marché, au début de la rue Saint Dizier, non loin de la Porte Saint-Nicolas. Nofal, Georges, le Belge m’ont demandé de venir participer à une réunion dans ces locaux du Parti Communiste. (Je viens à tort d’utiliser le pronom de la première personne du singulier. Marie France était aussi de la “fête”.)

Je connaissais ces locaux. À la fin des années 50, j’avais participé à son achat avec un versement d’un cinquième de mon salaire, ce que je trouvais alors conséquent. Que me reste-t-il de cette soirée qui fut le départ de mon engagement auprès de ces jeunes militants ? Je dis jeunes militants, car j’étais de six à huit ans plus âgé qu’eux.
Il est huit heures du soir, la nuit est tombée. Nous entrons dans la librairie et montons au premier étage. Une salle enfumée contient une trentaine de personnes, assises pour la plupart à même le plancher. Face à nous, à une table trois personnes qui n’ont rien d’étudiants. Au centre, le “chef”, une cinquantaine d’années. Échanges verbaux plus ou moins chauds. Jeu, comédie ou agressivité réelle. Incapable de le dire. Votes à main levée. Je regarde les étudiants du Carnot. Je les imite avec un léger temps de retard. Nofal demande une interruption de séance. Le groupe Carnot sort. Je sors avec eux. J’écoute, je regarde, je ne comprends rien. Révisionnisme, marxisme-léninisme, rapport Khrouchtchev, théorie-pratique. Des mots, des concepts qui n’avaient aucun sens pour moi. Peut-être, n’est-ce même pas dans ces moments que je les ai entendus pour la première fois.

Retour dans la salle où sont restés les autres militants de l’UEC et les responsables du Parti. Votes. Je lève la main. Je suis un pion.
Avant de partir, j’entends en conclusion le responsable du Parti : “Camarades, la lutte des claches, ch’est complexche.”
Je pense qu’il y a scission. Pourquoi ?

Il est évident qu’il me faut lire et tenter de comprendre les analyses marxistes léninistes. Manifeste du parti communiste (1848), Les luttes de classes en France (1850), Salaire, Prix et Profit (1847) de Karl Marx, Que faire ? et L’impérialisme stade suprême du capitalisme de Lénine me sont tout d’abord conseillés. J’achetais de moi-même trois volumes : Grève, Grève masse, Grève politique de masse, de Maurice Thorez [6]. Je suis la seule personne que je connaisse qui ait lu ces ouvrages sortis des oeuvres complètes du principal dirigeant du Parti Communiste de l’après guerre.
Althusser est le philosophe [7], maître des “ulmards”. Pour Marx, Les cahiers du Marxisme-léninisme... Toujours le même refrain : je n’y comprends pas grand chose.

Il y a effectivement scission. Nofal, Georges et quelques autres sont en contact avec les Normaliens de la rue d’Ulm [8]. C’est le début de l’UJC (ML). Nofal et Georges font partie du bureau politique.

L’Union des jeunesses communistes marxistes-léninistes, UJC (ML), est une organisation maoïste fondée le 10 décembre 1966 par une centaine de militants exclus de l'Union des étudiants communistes. Dirigée par Benny Lévy, Robert Linhart et Jacques Broyelle, (le vrai patron est alors Robert Linhart) elle est principalement implantée à Paris à l'École normale supérieure. Contrairement au Mouvement communiste français (marxiste-léniniste) et au Parti communiste marxiste-léniniste de France, l'UJC (ML) considère que la construction du parti communiste doit reposer sur l'initiative des masses populaires.
Pour l'UJC (ML), les étudiants maoïstes doivent se lier aux ouvriers en abandonnant leurs études et en allant travailler dans les usines. Elle crée les Comités Vietnam de base pour défendre le régime du Nord-Vietnam contre l'armée américaine et publie le journal Garde rouge.


"Les principes et les thèses qui constituent la résolution de la première session du premier Congrès de l'U. J. C. (m.-l.) ont guidé notre lutte contre le révisionnisme dans l'U. E. C., organisation étudiante du P. C. F. révisionniste. Cette lutte est aujourd'hui victorieuse : l'U.E.C. n'existe plus; la majorité réelle des étudiants communistes se sont placés sur les positions du marxisme-léninisme."

RÉSOLUTION POLITIQUE DE LA Ière SESSION DU Ier CONGRÈS DE L'U. J. C. (m.l.) [Tiré des Cahiers Marxistes-Léninistes, n°15, janvier-février 1967.]


[1] Il s'agit de Georges Sturm, il a participé au voyage en Chine en remplacement d'un camarade qui ne pouvait s'y rendre. Pour en savoir plus, lire l'entretien qu'il a accordé aux DNA en 2011.
[2] Nofal Germanos a fait partie du bureau politique de l'UJC (ML). A ce titre, il a participé à un voyage en Chine à l'invitation des autorités chinoises. Il a été le premier directeur de la publication de Garde Rouge, l'organe de l'UJC (ML).
[3] GRCP : Grande Révolution Culturelle Prolétarienne. Référence à la Révolution Culturelle menée par Mao en Chine à partir de 1966.
[4] Judith Lacan est la fille du psychanalyste Jacques Lacan
[5] Robert Linhart, aujourd'hui sociologue, est un des normaliens qui quitte l'UEC pour fonder l'UJC-ML en 1966. Il en est le théoricien. En raison de problèmes psychologiques, il ne participe que peu à l'effervescence de mai 1968 et fonde la Gauche prolétarienne avec Benny Levy à l'été 1968.
Régis Debray est une figure bien connue du monde intellectuel aujourd'hui, notamment depuis sa proximité avec François Mitterrand au début des années 1980.
Benny Lévy (1945-2003) était philosphe, normalien également. Membre de l'UEC puis de sa scission pro-chinoise l'UJC-ML, il poursuit dans la voie maoïste avec la fondation de la Gauche Prolétarienne. Il adopte le pseudonyme de Pierre Victor. Il devient ensuite le secrétaire de Jean-Paul Sartre.
[6] Maurice Thorez (1900-1964) a dirigé le Parti Communiste Français de 1930 à 1964. Il a incarné la fascination des communistes pour l'URSS dont il a fidèlement suivi les consignes, de la stratégie de "classe contre classe" au stalinisme en passant par le Front Populaire.
[7] Louis Althusser (1918-1990) Philospohe français ayant appartenu au courant structuraliste, connu pour sa relecture attentive du marxisme débarassée des interprétations staliniennes.
[8] L'Ecole Normale Supérieure. Fondée en 1794, cette école supérieure forme des étudiants pour la recherche et l'enseignement. Son accès se fait par un concours très sélectif après deux années de classes préparatoires (en hypokâgne et kâgne pour les lettres). La formation est aussi bien scientifique que littéraire. Les élèves sont rémunérés et ont le statut de stagiaire-fonctionnaire. Ils doivent dix ans à l'Etat. L'école de la rue d'Ulm à Paris est la plus ancienne. Deux autres ont été créées à Cachan et à Lyon.

La semaine prochaine, la suite de 68 raconté à mes petits-enfants avec le cinquième épisode :
"Garde Rouge à Nancy"

Les autres épisodes de notre série sur Mai 68 à Nancy :Et retrouvez le sommaire du dossier sur l'année 1968 en France et dans le monde.


14 février 2010

68 raconté à mes petits-enfants (3) Solitude et barbouille

Suite du témoignage de Guy Charoy, après sa découverte de la politique et ses premiers engagements, Guy s'est lancé dans la "vie active" comme instituteur. Il nous raconte cette semaine sa mutation à Badonviller où il s'ennuie ferme mais en profite pour lire et continue à "barbouiller".


Badonviller... Depuis trois mois. Nommé là à mon retour d’Allemagne. Impossible de récupérer mon poste de Varangéville. Terminé le travail d’instit en classe primaire. Nommé au Cours Complémentaire de Badonviller pour enseigner l’allemand.
Badonviller... Fin fond de la Lorraine, limite des Vosges. Badonviller cul-de-sac. Un bus pour garder le lien avec la civilisation, avec Lunéville. Et pas tous les jours. Badonviller terminus. Ensuite, demi-tour. Ou alors, passer le col de la Chapelotte, puis le Donon et descente sur Schirmeck, direction Strasbourg. Badonviller, mon Guernesey sans le génie (1).

Je suis logé dans les bâtiments scolaires que je ne quitte guère. Une vie d’ermite succède à la vie aventureuse et tumultueuse en Teutonie. Je ne quitte mon antre que pour acheter les clopes, le pain, les pâtes, les flocons d’avoine et les pommes du repas du soir. Pour accompagner le matin dès sept heures et quart et le soir jusqu’à six heures et demie les enfants dans le car, une semaine par mois, lorsque je suis de service. Les autres jours, je me lève au grincement des freins du car de ramassage qui stoppe à quelques mètres de ma fenêtre.
Mon appartement se compose de deux pièces : deux glacières. Le matin, j’ai juste le temps de sauter dans mon pantalon, d’avaler un bol d’eau que je fais chauffer sur mon réchaud à gaz butane, de me passer les mains dans les cheveux pour plaquer les épis éventuels de la nuit. Je bois mon thé debout, le bol dans une main, le rasoir électrique dans l’autre. Je n’ai pas la fraîcheur du gardon quand, dix minutes plus tard, je me retrouve devant les élèves de la première heure. À midi, je mange à la cantine avec mes collègues et les enfants. Je n’allume mon fourneau à fuel qu’à la fin de ma journée. Deux heures pour tempérer les pièces aux plafonds à quatre mètres. Je peux ôter une pelure quand j’engloutis sans guère mastiquer les raviolis tièdes que je pique à la fourchette direct dans la boîte ou les flocons d’avoine cuits dans trois quarts de litre de lait avec des raisins secs que je pioche à la cuillère direct dans la casserole.

Je m’adonne à nouveau à mes activités de barbouilleur, activités que j’avais abandonnées depuis mon retour d’Allemagne. Je passe des heures à patauger dans les couleurs à l’huile, à en tartiner les toiles et les feuilles de bristol. Et c’est le supplice, lorsque, sous l’eau courante, je frotte chacun de mes doigts à la brosse à ongles. Je m’étonne que des stalactites de glace ne pendent pas à l’unique robinet au-dessus de l’évier. L’eau froide me bloque les articulations. Le matin, au réveil, les articulations ont doublé de volume et je peux à peine bouger les phalanges. Barbouiller et lire. Mes deux occupations. Le samedi, en début d’après-midi, les courses du week-end et je ne sors plus de ma tanière avant le lundi.

Pourquoi ce long préambule ? Et mai 68 ?

Je cherche seulement à te dire dans quel état d’esprit, je pouvais être dans les années qui ont suivi mon retour d’Allemagne. J’avais vingt-quatre ans. Je vivais reclus. Je n’étais au fait des
événements que par l’intermédiaire du transistor acheté à Kiel qui me tenait compagnie à longueur de temps passé dans mes deux pièces.
Le meilleur devait cependant m’arriver à Badonviller : la rencontre de Marie France. Et tu vois, j’avais bien fait d’attendre la bonne personne. François n’aurait jamais été François et toi, tu ne serais pas là !



Les Békawés

Au cours de l’année 1962, je retournais, de temps à autre, le jeudi à Nancy où je retrouvais les Békawés qui étaient des amis de ma soeur Dany. De longues heures au "Carnot", une brasserie près de la fac qui alors était de lettres et de droit. En face du Carnot se trouvait "l’Aca". Par une sorte d’accord tacite, "le Carnot" était “réservé” aux étudiants de lettres, plutôt de gauche, et "l’Aca" aux étudiants de droit, plutôt de droite.
Assis sur les banquettes du Carnot, face à une bière ou le plus souvent un café servi dans une petite tasse octogonale vert bouteille, six à huit jeunes garçons et deux ou trois filles d’une vingtaine d’années à peine pour certains, Claude, Marie, le grand et le petit Griff, le Bob, le Belge, Nofal, Georges et quelques autres, discutaient, s’engueulaient, plaisantaient. Ils refaisaient le monde, ou plutôt ils construisaient un monde nouveau. De temps à autre, l’un d’eux appelait “la Juju”, une serveuse boulotte, robe noire, tablier blanc et un énorme nœud dans les cheveux, tout droit sortie d’une gravure de Hansi (2), pour un autre petit noir bien serré.
Marx, Lénine, Gramsci et bien d’autres dont je n’avais jamais entendu parler. J’étais impressionné et tentais de suivre le discours politique de ces anciens khâgneux dont certains poursuivaient des études littéraires, de philosophie ou de sociologie.
Faulkner, Fitzgerald, Gombrowicz, Henry Miller, mais aussi Beaudelaire, Artaud, Maïakovski, Bataille, les surréalistes.
J’écoutais, je notais mentalement. Je découvris aussi que la bande dessinée avait aussi son charme pour ces garçons et Nofal accepta un jour de me prêter ses Lucky Luke.
Jourdheuil parlait de Brecht. Il se clarifiait les idées à nos dépends. De la confusion naîtrait la clarté.

Même au flipper, je ne parvenais pas à rivaliser.

Deux ou trois ans plus tard, Marie France et moi, nous retrouvions le groupe au Piroux, bistrot non loin de la gare, qui faisait partie du pâté de maisons aujourd’hui détruit pour permettre à des promoteurs de construire les deux tours près de la gare. Un jour, toute la bande descendit la rue Stanislas, tenant toute la largeur, imitant les avions. J’avais quelques inquiétudes pour Marie France enceinte de plusieurs mois de François...

Guy Charoy

Notes :


(1) Les amateurs d'histoire et de littérature que vous êtes auront compris l'allusion à l'exil de Victor Hugo à Guernesey sous le Second Empire.
(2) Hansi (1873-1951)est un célèbre illustrateur alsacien

La semaine prochaine, la suite de 68 raconté à mes petits-enfants avec le quatrième épisode :
"Pendant ce temps... UEC et UJC (ML)"

Les autres épisodes de notre série sur Mai 68 à Nancy :Et retrouvez le sommaire du dossier sur l'année 1968 en France et dans le monde.

07 février 2010

68 raconté à mes petits-enfants (2) Dans la "vie active"

Suite du témoignage de Guy Charoy, après sa découverte de la politique et ses premiers engagements, Guy se lance dans la "vie active" comme instituteur.


Mes deux années d'enseignement à Varangéville furent deux années d’un militantisme désordonné. Très influencé par un jeune instit’ sorti de l’EN [Ecole Normale, NDLR] l’année où j’avais été admis, et qui retrouvait une classe après trente deux mois d’Algérie. Deuxième classe, enseignant dans le bled, il avait toujours refusé de porter le fusil dans ses déplacements. De retour en France, il s’était inscrit à la cellule du Parti Communiste de Varangéville et en était très vite devenu un des responsables. Je l’accompagnais souvent dans des réunions, des sorties pour collages.
Je rencontrais ainsi un militant communiste immigré italien, maçon de son métier qui avait fui le fascisme et avait activement participé à la Résistance. Il avait conservé toutes ses armes, persuadé qu’elles lui serviraient le Grand Soir(1).


École Victor Hugo à Varangéville

Je militais avec mon collègue contre les lois nouvelles favorables aux écoles privées (2) et nous organisions, après des campagnes d’affichage sauvage, des réunions à Saint-Nicolas, Varangéville et Dombasle. Je fus convoqué par le secrétaire de la section du SNI (Syndicat National des Instituteurs) qui avait été lui même convoqué par la police. Les affiches manuscrites ( des dazibaos (3) avant l’heure) étaient collées si haut sur les églises et les bâtiments publics qu’il fallait une échelle pour les décrocher. Et les curés du coin et leur valetaille n’étaient pas enthousiastes à la vue des murs de lieux de culte ornés de rectangles de dimensions variables dénonçant les cadeaux que le pouvoir se préparait à leur faire. L’affiche posée sur la brosse du balai à manche double et à bout de bras était collée à plus de trois mètres cinquante. Le Mimile, notre secrétaire, pensa tout de suite à nous deux et à moi en particulier.

Je défilais à chaque occasion avec les communistes et autres opposants à la guerre d’Algérie. Les agents de la force publique de l’époque, autrement dit les poulets ou les hirondelles quand ceux-ci se déplaçaient à bicyclette, avaient de lourde capes qui, je le pensais, devaient les protéger de la pluie. Elles avaient une autre fonction. Pliées en quatre et posées sur l’épaule, les agents tenaient leur cape à deux mains par la pointe, puis avançaient en la faisant tourner devant eux. Je découvris leur efficacité pour faire reculer une manif. Les billes de plomb cousues dans l’ourlet en faisaient une arme efficace. Certes, dès 68 et dans les années qui suivirent, les outils d’attaque et défense de la police avaient fait de gros progrès leur permettant de répondre aux manifestants casqués, armés de manches de pioche, de lance-pierres et éventuellement de cocktails Molotov.


Cette activité qui devenait routine m’incita à briser cet ennui grandissant, dont les raisons essentielles étaient un “abandon” de tous mes vieux camarades d’École Normale, qui les uns après les autres se mariaient et l’incapacité dans laquelle j’étais de me fixer avec une fille.
L’idée de couple, de mariage (un enseignant ne pouvait alors vivre en couple sans être marié), m’angoissait à tel point que l’engagement pris et la date fixée, je fuyais lâchement, chargé d’une valise de fausses excuses. Ma décision de partir en Allemagne pour une année fut une belle occasion pour abandonner Colette. Une année passée (60-61) à Kappeln sur les bords de la Baltique. Une année de rencontres amicales, culturelles, amoureuse, d’expériences, une année faite d’imprévus, une année loin de la politique qui, en France, avait conduit à des situations dramatiques : le putsch des Généraux du 23 avril 1961 (4), également appelé putsch d'Alger, tentative manquée de coup d'État.



Guy Charoy

Notes :

(1) Pour ceux qui aspirent à la Révolution et à l'avènement d'un monde nouveau, le "Grand Soir", c'est le moment tant attendu où cette perspective devient possible suite à une révolte, une guerre, une large victoire électorale ou l'issue favorable d'un mouvement populaire.
(2) Sans doute une référence à la loi Debré de 1959 qui permet à des établissement privés de passer un contrat avec l'État. Ils s'engagent à respecter certaines règles en échange de la rémunération des professeurs par l'Etat.
(3) En Chine , les dazibaos sont des affiches rédigées par de simples citoyens. Leur objet est souvent politique. Pendant la Révolution culturelle qui démarre en 1966, elles furent abondamment utilisées pour dénoncer les "révisionnistes" et les réactionnaires et furent instrumentalisés par Mao.
(4) Référence au putsch perpétré le 21 avril 1961 par quatre généraux (Challe, Salan, Jouhaud, Zeller) pour s'opposer à la politique algérienne de de Gaulle qui a parlé depuis 1959 d'autodétermination. Dénonçant ce qu'ils considèrent comme une politique d'abandon, ils prennent le contrôle d'Alger. Le 23, de Gaulle apparaît en uniforme à la télévision et déclare : "Un pouvoir insurrectionnel s'est établi en Algérie par un pronunciamiento militaire. […] Ce pouvoir a une apparence : un quarteron de généraux en retraite. Il a une réalité : un groupe d'officiers, partisans, ambitieux et fanatiques." Il utilise alors l'article 16 de la constitution qui lui donne des pouvoirs plus importants temporairement.

La semaine prochaine, la suite de 68 raconté à mes petits-enfants avec le troisième épisode :
"Solitude et barbouille"

Les autres épisodes de notre série sur Mai 68 à Nancy :

23 janvier 2010

68 raconté à mes petits-enfants (1) Découverte de la politique et engagement

Je vous propose de découvrir un témoignage très intéressant, celui de Guy Charoy. Né en 1937, il accomplit ces études au cours des années 1950 et participe pleinement à l'effervescence politique à l'extrême gauche au cours des années 1960 et 1970. Dans ce témoignage subjectif (et revendiqué comme tel), rédigé au départ pour sa petite-fille Jeanne, il revient sur son parcours en commençant par évoquer son éducation politique et les raisons de son engagement. Nous le suivrons donc pendant plusieurs semaines. Les illustrations ont été sélectionnées par ses soins, certaines sont de sa main. Je le remercie chaleureusement de rendre disponible cette tranche de vie qui nous apprend dans le même temps beaucoup de choses sur l'histoire sociale et politique de la Lorraine et de la France des annés 1950 aux années 1970.
Etienne Augris



“Sous les pavés, la plage”
J’ai dû être un grain de sable collé au pavé.


- Dis, Papa, parle-moi de 68.
- Demande à ton Grand-père, lui répond son père.

C’est ainsi que Jeanne m’a présenté la chose.
Comment te raconter des moments qui datent de près de quarante ans, moments de jeunesse
enthousiaste et confiante dans la générosité des individus et dans un avenir meilleur pour l’humanité, sans tomber, comme je viens de le faire, dans les clichés et la banalité.
Ces souvenirs seront tout d’abord des impressions. Si honnêtes soient-ils, ils seront totalement
subjectifs et je ne me garderai pas de cette subjectivité. Je dois également reconstruire les bases sur lesquelles reposent pour moi cette aventure. Si erreurs dans les souvenirs des faits il y a, j’espère qu’elles sont minimes.

1. Découverte de la politique et engagement (années 1950)

Dès mon entrée à l’École Normale, j’ai accueilli avec enthousiasme les idées de gauche les plus extrêmes. Au delà de l’esprit laïque, il y avait certes une compétition du meilleur bouffeur de curé, mais surtout, j’approchais des militants politiques, des cinquième année, ceux qui préparaient Normale Sup’, des communistes qui étaient loin des idées raisonnablement sociales de ma famille. Dictature du prolétariat, République des soviets, éradication du Capitalisme, se mêlaient aux discours antinazis, confondus avec les propos anti-allemands et le refus de l’impérialisme américain. Tous ces concepts recouvraient mal ou pas du tout une réalité et j’aurais eu bien des difficultés à en donner une définition ou seulement quelques aspects concrets.

J’avais déjà la foi en l’avenir radieux de l’humanité selon les principes justes et égalitaires “À chacun ses besoins, à chacun selon ses possibilités”, débarrassé des exploiteurs capitalistes, colonialistes et impérialistes dont la représentation la plus évidente restait l’ogre ventru au gros cigare entre les dents, au chapeau haut de forme et à la redingote cousue de dollars.

Je me suis vu entraîné avec fierté et grande satisfaction dans les actions menées par le Mouvement de la Paix, courroie, une de plus, du Parti Communiste Français. C’est ainsi que je me retrouvais le dimanche matin dans un des plus misérables quartier de Nancy, (celui-ci fut rasé pour le grand bien des promoteurs qui construisirent ce qu’on appelle aujourd’hui le Saint-Séb’) à faire signer des cartes contre le réarmement de l’Allemagne, donc contre la Communauté Européenne de Défense (C.E.D.), première tentative d’acte politique dans l’optique d’une construction européenne. Mais c’est une autre histoire et j’en ai déjà parlé par ailleurs. Pas d’analyse, pas d’explications sur le bien fondé de cette pétition de la part des “chefs”. Staline, le "Petit Père des Peuples" était contre... contre le réarmement de l’Allemagne.... alors, il fallait être contre. Si je ne savais pas pourquoi, Lui savait.

Depuis, j’ai appris qu’il s’agissait d’une tentative de constitution d’une défense commune des états qui peu de temps auparavant [En 1951, NDLR] avaient créé la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier (CECA).

Imagine, Jeanne, j’ai seize ans, un paquet de cartes jaunes, format carte postale et un crayon à bille dans la main. Rue Bénit, rue Blondot, rue de la Hache. La porte s’ouvre sur un couloir
sombre aux murs lépreux. Excuse-moi d’utiliser ce cliché d’écriture, mais je ne trouve rien de mieux. Je grimpe dans l’obscurité un escalier de bois aux marches incertaines et à la rampe branlante. À chaque palier, deux portes. (NB . Les cartes postales sont bien antérieures aux 2 événements relatés.)

Cinq kilos de fonte dans l’estomac, j’ose frapper. Des poches sous les yeux, les cheveux raides et filasses, en combinaison sous ce qui dut être une robe de chambre, une dame, que je crus reconnaître, ouvre. Quand j’allais jouer au flipper dans le bistrot près du Lycée Cyfflé, elle portait des bottes noires qui montaient très haut sur les cuisses presque jusqu’à sa jupe en cuir très courte. Oeil cerné de noir et paupière bleue, rouge à lèvres largement débordant et vaste décolleté ne laissaient que peu de doutes sur sa profession.

Je commence par bafouiller et conclus clairement : “C’est contre les Allemands pour pas qu’ils se réarment”. Elle n’en écoute pas plus; elle grimace un sourire, me prend la carte et me la signe.
“Merci, Madame”. La porte est déjà refermée. Presque partout, j’ai un accueil semblable. Aucune manifestation hostile, peu de paroles. Je pénètre parfois dans la pièce et j’aperçois sept ou huit personnes qui vivent dans une seule pièce. Plusieurs matelas sont à même le sol sur lesquels des enfants sont encore couchés. Je tente d’être le plus discret possible et ne m’attarde pas. Quand j’ai recueilli entre quinze et vingt signatures, je rentre à l’E.N. soulagé, content, fier.
Tu as raison, cet acte n’avait rien de bien glorieux, mais ce fut pour moi l’un des plus difficiles à accomplir. Parce que, peut-être, c’était mon premier acte politique.


Nous venions depuis peu de quitter l’Indochine [En 1954, NDLR]. Après le désastre de Dien Bien Phu, ce fut la guerre d’Algérie. J’échappai aux trente-deux à trente-six mois de service militaire que mes camarades accomplirent dans des conditions variées, mais parfois difficiles et dangereuses. Deux jours passés à Metz, le temps de me déguiser en bidasse, de me faire “réformer définitif”, de voir le matin, depuis le quai de la gare de Metz, un train complet de bleu bites qui se rendaient à Marseille pour prendre le bateau direction Alger. Retour dans mes foyers, c’est-à-dire chez mes parents. Dans l’après midi, j’achetai un seau de cinq kilos de peinture blanche et une brosse. Vers onze heures du soir, je filai dans ma Quatre chevaux sur la Nationale 4 en direction de Toul. C’était alors une nationale à deux voies seulement. Je stationnais dans la montée sur Laxou et commençais mon travail de militant solitaire. Au milieu de la chaussée, je peignis en large lettres PAIX, puis cinquante mètres plus loin EN et cinquante plus loin encore ALGERIE. Inspiré par DUBO DUBON DUBONNET. Durant le quart d’heure que me prit cette activité, je ne fus dérangé que par trois voitures ... Comme il me restait quelques litres de peinture, je me rendis à l’entrée de Nancy au grand garage Renault où travaillait mon père et devant le large portail d’entrée des véhicules, j’écrivis ces mêmes mots, en arc de cercle. Travail soigné.

Mes camarades étaient dans le djebel, risquaient leur vie dans les Aurès. Malgré tout, j’étais décidé, en “mauvais Français”, à soutenir la lutte du peuple algérien.

Retour à la vie civile sans difficultés majeures. Je n’ai pas eu le temps, en quarante huit heures, vaillant appelé sous les drapeaux au service de la Nation, de perdre les habitudes d’un quotidien fait d’éducation des enfants du Peuple, de causettes politiques avec des membres du Parti de la cellule de Saint-Nicolas, de collage d’affiches et de bagarres à coups de balais à colle avec les mecs de la SFIO [l'ancien nom du Parti Socialiste, NDLR], de sorties le samedi soir chez des potes mariés depuis leur sortie de l’Ecole Normale ou peu de temps après, de grasses matinées le dimanche matin. Perspectives bouchées, horizon sans relief, grisaille et monotonie. La guerre d’Algérie s’enlise.

Manifestations...Bouge, bouge, camarade ... manifs, tracts, peinture... PAIX EN ALGÉRIE...
Autre routine.

Difficile de parler d’une réelle activité politique à cette époque. Je n’avais aucune formation, aucune lecture, aucune réflexion, aucune approche théorique. J’étais pour les faibles contre les forts, pour les pauvres contre les riches, pour les dominés contre les dominants, pour les colonisés contre les colonisateurs, pour les opprimés contre les oppresseurs, pour les noirs contre les blancs, pour les ouvriers contre les patrons, pour la dictature du prolétariat contre la “démocratie bourgeoise” qui n’était qu’une forme de dictature des possédants. Pour la lutte des classes. J’étais aussi contre l’attitude de mon père qui refusait toute discussion et tout engagement et qui ne participait que rarement à des mouvements de grève pourtant fréquents dans les années 50. Et je trouvais injuste qu’il profitât des avantages que les grévistes avaient arrachés par leurs luttes aux patrons. Il appartenait à l’une des entreprises les plus puissantes de France, Renault, qui avait été nationalisée peu après la Libération. Renault, dont le syndicat majoritaire était la CGT, était une des entreprises les plus combatives et mon père ne manquait jamais de répéter, quand une grèvedébutait à Billancourt ou à Flins : “Quand Renault tousse, toute la France s’enrhume”. Il est vrai que les mouvements sociaux chez Renault étaient très suivis et entraînaient souvent des grèves importantes dans d’autres secteurs d’activité.

Guy Charoy

La semaine prochaine, la suite de 68 raconté à mes petits-enfants avec le deuxième épisode : Dans la "vie active"

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